
L’article L 1235-3 du code du travail, tel que modifié par l’ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017, prévoit que le salarié licencié sans cause réelle et sérieuse a droit à une indemnité en fonction d’un barème qui prend en compte la taille de l’entreprise et l’ancienneté du salarié.
En 2019, plusieurs conseils de prud’hommes ont décidé d’écarter l’application de ce barème, au motif qu’il était, selon eux, contraire aux stipulations de la Charte Sociale Européenne et la Convention n°158 de l’Organisation Internationale du Travail (OIT), textes internationaux ratifiés par la France (notamment Amiens jugement du 13 décembre 2018, Troyes jugement du 19 décembre 2018, Grenoble jugement du 18 janvier 2019).
A la suite de ces décisions, la Cour de Cassation a été saisie pour avis.
Par deux avis de sa formation plénière lus le 17 juillet 2019, la Cour de Cassation a considéré que le barème précité n’était pas incompatible avec l’article 24 de la Convention n°158 qui laisse aux Etats la faculté de prévoir l’indemnisation « adéquate » en cas de licenciement injustifié (Cass. avis n°15012 et 15013 du 17 juillet 2019).
La position de la Cour de Cassation aurait dû mettre un terme au débat, ce même si un avis ne s’impose pas juridiquement aux juges du fond. Pourtant, depuis lors, d’autres juridictions prud’homales ont remis en cause la conventionalité de ce barème (Grenoble par ex. le 22 juillet 2019).
Les juges du fond ont aujourd’hui tranché (Cour d’appel de Reims 25 septembre 2019 RG 19/00003 et Cour d’appel de Paris 30 octobre 2019 RG 16/05602).
Il ressort de ces dernières décisions, en particulier celle de Paris, que :
- les articles 6§1 et 13 de la CESDH ne sont pas méconnus par l’article L 1235-3 du code du travail qui opère seulement une limitation matérielle et non procédurale ;
- l’article 24 de la Charte sociale Européenne n’a pas d’effet direct en droit interne dans un litige entre particuliers, de sorte qu’il ne peut être invoqué devant les juridictions nationales ;
- les articles 20, 21 et 30 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union Européenne ne sont pas méconnus par l’article L 1235-3, dans la mesure où ce texte laisse « subsister entre une limite minimale et une limite maximale exprimées en mois de salaire brut un pouvoir d’appréciation à la juridiction du fond » ;
- les articles 4, 9 et 10 de la Convention internationale du travail n°158, qui sont d’application directe, n’interdisent pas aux Etats signataires de prévoir un barème d’indemnisation, dès lors que ce barème n’empêche pas « une indemnité adéquate ou une réparation appropriée ».
Il ressort donc de l’arrêt précité que le barème de l’actuel article L 1235-3 du code du travail, outre qu’il est conforme aux normes à valeur constitutionnelle (Conseil Constitutionnel n°2018-761 DC du 21 mars 2018), est également compatible avec les engagements internationaux pris par la France en matière d’indemnisation des travailleurs injustement licenciés.
Fin du débat ?